L’arbre qui planta un arbre,
L’histoire retiendra qu’un jour le baobab majestueux,
Sentit son tronc fléchir, sa masse défaillir,
Tel un château de cartes titillé par un vent mesquin.
Ce fut à la naissance de la petite tige,
Elle se dressait sur sa branche centrale,
Comme pour s’imposer à sa vue,
Craignant que l’arbre dignitaire ne se détourne,
De ce rejeton surgi de nulle part,
Ce bourgeon à peine révélé à la savane.
C’était mal connaître le baobab royal.
À la vue de cette brindille frêle, verte,
S’évertuant à se tenir droite,
Par mimétisme assurément,
De joie, les bras lui en tombèrent.
Puis, le baobab bomba le tronc,
Gonfla ses racines,
Dressa ses feuilles éparses,
Comme pour avertir, la faune, la flore,
La pluie, le vent, le tonnerre, l’éclair,
Que nulle agression ne serait permise.
Il avait dorénavant un foyer en son sein,
Un descendant à qui il dévouerait sa vie.
L’histoire retiendra que le baobab se métamorphosa,
Qui l’eut cru?
Le baobab devint l’as des contorsions.
Il ondulait son tronc telle une berceuse,
Pour que petite tige s’endormît paisiblement,
Petite tige se nourrissait d’une sève riche,
Dont nulle autre branche ne put connaître la saveur.
Telle une saule pleureuse, le baobab contraint sa nature,
Ses feuilles jaillirent, touffues et épaisses,
Elle formèrent une cloche tout autour de la tige,
Pour lui épargner les salves de pluie,
La chaleur saisissante,
Les regards indiscrets.
Quand vint l’heure de lui transmettre
Les valeurs cardinales de droiture et de solidarité,
Dans un langage dont seule petite tige pouvait saisir la portée,
Le baobab lui apprit à ne jamais détourner
L’eau destinée à irriguer les foyers voisins,
Dût-il contraindre ses puissantes racines,
À ne jamais gober plus que de raison,
Mais à nouer des liens de fraternité sincères,
Dans le monde souterrain qui était le leur.
L’histoire retiendra que petite tige devint une branche solide,
Oú aimaient à se poser les oiseaux tisserands,
La branche devint robuste, imposante,
Elle n’avait rien perdu de sa prestance.
Tel un filao elle se dressait droite et fière,
Bientôt son faîte recouvrit le sommet du baobab.
Alors, par égard pour celui qui lui a tant donné,
Celui qui jadis apprit à se courber pour lui chuchoter à l’oreille contes et légendes,
Le fils pesa de tout son poids sur la vieille branche qui le portait jusqu’alors.
La branche ploya vers le sol,
Elle déposa avec grâce le jeune pousse.
Le sol se creusa, et accueillit comme il se dut, le digne fils du baobab.
Le jeune baobab prit racine,
Tout près du vieux père,
Qui bientôt tirerait sa révérence,
Non sans avoir goûté à la joie discrète, humble.
D’avoir été un père exemplaire.
Très bonne fête des pères à tous!
Soukeyna Kane.
15 /06/2025